L'accord nucléaire avec l'Iran n'est que le début. L'objectif du Président est une détente intégrale avec l'Iran, aux dépens des alliés de l'Amérique.
Quand le président Obama s'est présenté devant le pupitre de la roseraie de la Maison-Blanche, le 2 avril, il respirait la victoire. Il annonça avec une fierté palpable que les négociateurs de Lausanne étaient parvenus à «un arrangement historique avec l'Iran, qui… l'empêchera d'obtenir une arme nucléaire. »
En vérité, les négociateurs ne sont parvenus à aucun compromis, historique ou pas. Obama a célébré quelque chose qui n'existe pas, du moins pas encore. Le Secrétaire d'État John Kerry et le ministre des affaires étrangères iranien Javad Zarif ne sont pas parvenus à se mettre d'accord sur un texte explicitant les termes du supposé «accord-cadre de Lausanne». Ils ont publié des «relevés de conclusions» séparés. Sur certaines questions clés les documents sont contradictoires et sur d'autres ils sont totalement muets. Les déclarations des responsables n'ont pas beaucoup clarifié la nature des divergences, ni rectifié les omissions. L'une des déclarations officielles semblait même élargir le champ des divergences.
Dans son discours sur l'accord-cadre de Lausanne, Ali Khamenei, le Guide suprême de l'Iran, a nié catégoriquement qu'un arrangement ait été conclu. Il a même contesté certaines dispositions de l'accord en gestation qui avait été rapportées par les Américains. Par exemple, il a contesté lque l'accord-cadre permettrait des inspections «intrusives» comme l'avait affirmé Obama. Au contraire, l'accès aux sites militaires sera interdit aux inspecteurs, car expliqua-t-il, «on ne doit absolument pas permettre des intrusions dans les domaines de la sécurité et de la défense de l'État sous prétexte d'inspection."
Etant donné l'importance de l'écart entre les deux parties, qu'est-ce qui permettait à Obama d'annoncer une percée historique ? Sans doute le Président était-il impatient de produire des preuves tangibles du progrès des pourparlers de façon que les Républicains ne puissent prétendre devant le Congrès que les négociations étaient en train d'échouer. Son calcul était d'opposer aux Républicains des avancées fictives et d'assimiler les divergences persistantes à des détails faciles à aplanir, et non des obstacles insurmontables.
Si la majoration des succès remportés à Lausanne était une manœuvre habile pour faire taire les critiques américains du Président, elle affaiblissait en même temps sa position face aux Iraniens. Son investissement personnel profond dans les négociations était dévoilé. Désormais, ne pas aboutir à un accord serait assimilé à un échec de grande ampleur. Pleinement conscient de la vulnérabilité du Président, Khamenei a exploité la faille dans un discours provocateur. Pas si vite, a-t-il fait savoir à Obama dans sa tirade. Si vous voulez obtenir l'accord dont vous vous êtes déjà félicité en public, vous devrez payer, vous allez me consentir de nouvelles concessions.
Si l'on se rapporte à ses comportements antérieures, Obama donnera à Khamenei ce qu'il désire. À toutes les étapes des négociations, ce sont exclusivement les concessions américaines qui ont permis d'avancer. Le destin de Fordow, un bunker profondément enterré sous une montagne près de Qom, est un bon exemple du fonctionnement de ce processus. Au début des négociations, Obama déclarait publiquement que l'existence de cette installation était en contradiction avec un programme nucléaire pacifique. Mais après après le refus catégorique de Khamenei de démanteler les infrastructures nucléaires de l'Iran, Obama a accepté la maintien de Fordow. Dans la dernière phase des négociations, sa position s'est encore adoucie. Non seulement le bunker resterait ouvert, mais il abriterait aussi des centrifugeuses opérationnelles.
Avec à des reculades de ce genre, ce sont les lignes rouges de Khamenei et non celles d'Obama qui sont susceptibles de déterminer l'architecture de l'accord en gestation. D'où les critiques adressées au Président, l'accusant d'incompétence et/ou de naïveté. Mais ces commentaires masquent l'essentiel. Le Président n'est pas attaché à une liste d'exigences précises. Pour lui, les dispositions spécifiques de l'accord nucléaire sont beaucoup moins importantes que son existence en elle-même. L'un des plus grands succès diplomatiques d'Obama est d'avoir persuadé toute la planète, y compris nombre de ses critiques, que le premier objectif de sa diplomatie iranienne était d'aboutir à un accord de contrôle des armements nucléaires. En fait, son premier objectif est la détente avec l'Iran.
Dans l'analyse du Président, la détente modérera plus efficacement le comportement de l'Iran qu'un accord formel, quel qu'il soit. De plus, elle ouvrira la voie à une vaste coopération avec Téhéran sur la sécurité régionale. La détente permettra en même temps aux États-Unis de se retirer du Moyen-Orient et de se concentrer sur leurs priorités domestiques. Finalement, elle donnera raison à l'éthique de «l'engagement» cultivée par Obama. Celui-ci considère "l'engagement" comme un modèle alternatif supérieur aux concepts d'origine militaire, dominants dans les milieux des affaires stratégiques américaines et appréciés des Républicains. En bref, la détente pérennisera l'héritage d'Obama.
À l'inverse, Khamenei poursuit des objectifs extrêmement précis. Il y en a trois qui dominent tous les autres. Il cherche d'abord à préserver les infrastructures nucléaires de l'Iran dans leur intégralité; il veut ensuite obtenir l'abrogation des sanctions qui frappent l'économie iranienne et troisièmement l'abolition du statut juridique international du régime qui assimile son pays à un État voyou. Sur ces trois sujets, Obama a déjà ratifié ses principales exigences.
En vérité, il y a encore des divergences significatives. L'une des plus épineuses est le rythme de la levée des sanctions, une nouvelle pomme de discorde que Khamenei a brandie dans son discours provocateur. Quand Obama dit que les sanctions devront être levées par étapes, Khamenei appelle à ce qu'elle soient immédiatement effacées. Les sanctions, exige-t-il, «doivent être complètement annulées le jour même de l'accord. »
Comment Obama comblera-t-il ce fossé ? Il a deux instruments à sa disposition. D'abord, il va offrir à Khamenei une certaine somme d'argent sous forme de bonus à la signature. Le Président peut à sa discrétion refuser d'appliquer un régime de sanctions adopté par le Congrès s'il considère qu'un impératif national le justifie. Cette arme donne à Obama la latitude de débloquer les comptes iraniens sous séquestre en Chine, en Inde, en Turquie, et ailleurs, des comptes qui abritent entre 100 et 120 milliards de dollars. Selon un rapport crédible, une fraction significative de ce montant, 50 milliards de dollars, serait remise aux Iraniens au moment où ils apposeront leur signature dans la case prévue.
Ensuite, le Président recherchera, et il l'obtiendra certainement, l'approbation de l'accord par le Conseil de sécurité des Nations unies. Sous ce sceau, les Européens, les Russes et les Chinois, entre autres, seront libres de renouer leurs liens commerciaux avec l'Iran. Et il n'y a pas que le commerce qui va prendre de l'ampleur. L'accord va aussi provoquer une intensification de la coopération militaire entre Iraniens et Russes. La récente annonce par Vladimir poutine de son intention de livrer des missiles antiaériens S300 à l'Iran donne un avant-goût de cette coopération.
Il sera difficile à Khamenei de résister à l'offre présidentielle d'un bonus à la signature, dans la mesure où cela ne limitera aucune de ses options. Au contraire, elles seront plus nombreuses. Même s'il n'a pas véritablement l'intention d'honorer les termes de l'accord, il a tout à fait intérêt à le ratifier, simplement pour empocher le bonus et engranger les bénéfices adjacents qui s'additionneront immédiatement. Plus tard, quand l'Iran commencera à violer l'accord, les États-Unis voudront probablement rétablir les sanctions. Mais ils devront alors parvenir à convaincre le Conseil de Sécurité, tâche plus difficile qu'auparavant pour la simple raison que le puissant lobby commercial européen aura alors de puissants intérêts d'affaires avec l'Iran à faire valoir. Il n'y a pas non plus la moindre assurance que les Russes et les Chinois soutiennent la reprise des sanctions. En tout état de cause, l'Iran négocierait à partir d'une position beaucoup plus forte qu'aujourd'hui.
Conscient de cette menace, le Congrès américain est en train de travailler sur une loi qui lui permettra d'exprimer par un vote son approbation ou sa désapprobation de l'accord avec l'Iran. (1) Cependant, un vote défavorable ne pourra contraindre Obama que s'il est adopté par les Représentants et le Sénat à une majorité qui lui interdit de mettre son veto, une barre très haute à franchir. Tant que le Président peut convaincre juste un tiers du Sénat ou de la Chambre des Représentants de soutenir sa diplomatie, il sera libre de poursuivre son plan. Il n'est pas certain que le Président gagnera son bras de fer avec le Congrès, mais les probabilités sont fortement en sa faveur.
La détente avec l'Iran semble être une modification mineure des options de la politique américaine, mais en vérité c'est l'équivalent d'un choc tectonique.
Obama met fin à l'endiguement de l'Iran en tant que principe directeur de la politique américaine au Moyen-Orient. Pour sûr, il continuera à s'engager du bout des lèvres sur la limitation de son influence, mais ses actes ne correspondront pas à sa rhétorique. En Syrie et en Irak surtout, Obama fait preuve depuis longtemps de beaucoup de compréhension pour les intérêts iraniens, bien qu'il traite Téhéran comme un simple partenaire du combat contre l'État islamique dont mieux vaut ne pas parler.
La détente exige qu'Obama prenne des distances avec tous ses alliés. Ceux-ci perçoivent la montée de l'Iran comme la première menace pour leur sécurité. Ce processus d'éloignement, qui est à l'œuvre depuis de nombreux mois déjà, est le plus avancé dans le cas d'Israël. Naturellement, Obama n'a jamais admis sa volte-face vis-à-vis d'Israël. Avec les hauts responsables qui l'entourent, il préfère imputer la détérioration des relations aux choix personnels du premier ministre israélien. Ces responsables n'ont pas mesuré leur effort pour nous informer sur une myriade de fautes imputables à Benjamin Netanyahou. Son attitude envers les citoyens arabes d'Israël serait fanatique, nous dit-on; il sert de pion au parti républicain, de façon abjecte ; et sa volonté supposée d'espionnage des États-Unis est le comble de la déloyauté.
Les attaques contre Netanyahou ont été extraordinairement personnalisées. Depuis que le premier ministre israélien est le critique le plus pertinent de l'accord avec l'Iran, Obama s'acharne à le discréditer, à la façon d'un avocat de la défense s'acharne à ternir la réputation d'un témoin vedette de l'accusation. Obama veut aussi que ce traitement serve d’avertissement pour d'autres alliés qui seraient tentés d'élever la voix. Et les critiques potentiels de l'accord ne manquent pas de raisons de l'étriller. En privé, les Français, les Saoudiens, et la plupart des pays arabes déplorent la politique d'Obama. Cependant aucun d'entre eux ne s'est levé et ne l'a directement attaqué comme l'a fait Netanyahou.
Pour bien faire comprendre la leçon, le Président a donné aux Arabes du Golfe un petit échantillon des châtiments qu'il tient en réserve à leur intention. Par exemple, dans une récente interview à Thomas Friedman, il a parlé des craintes de l'Iran éprouvées par ses alliés du Golfe. Ces craintes, a-t-il souligné, sont déplacées. En fait, l'Iran n'est pas la menace la plus sérieuse pour leur sécurité. Pour eux, la préoccupation la plus grave, ce sont les soulèvements populaires. La jeunesse, selon lui, n'a pas de moyens légitimes d'exprimer ses revendications. Ainsi la première priorité des Etats du Golfe doit être la réforme de politique intérieure. Dans son interview, le Président a manifesté un intérêt passionné pour une discussion sur la façon « de renforcer les institutions politiques de ces pays pour que la jeunesse sunnite soit persuadée qu'elle peut avoir d'autres choix que le ralliement à l'État islamique. »
Obama était à deux doigts d'accuser les alliés de l'Amérique d'alimenter les conflits ethniques et la violence qui se répand au Moyen-Orient. Ses menaces voilées étaient évidentes. Une semaine plus tard, il a été encore plus explicite au cours d'une discussion à propos de la Libye. Il a dit que les États du Golfe allumaient parfois «les flammes des conflits militaires.» Qu'il s'agisse d'Israël ou des pays du Golfe, le message d'Obama est le même : l'Iran n'est pas le problème ; le problème c'est vous. Mettez de l'ordre dans votre maison.
Pendant qu'ils critiquent leurs alliés pour leur étroitesse d'esprit, Obama et les hauts responsables qui l'entourent ont pris l'habitude de faire l'éloge de l'Iran pour son esprit œcuménique supposé. « Je pense à ce que les Iraniens ont fait, » a dit le président dans une interview en août dernier. «Ils ont réalisé que les positions maximalistes des Chiites d'Irak sont à long terme condamnées à l'échec. Et c'est là une très grande leçon pour tous les pays : vous voulez 100 %, vous croyez que le gagnant doit tout prendre, que tous les avantages lui sont dus. Tôt ou tard un gouvernement qui raisonne comme cela est voué à s'effondrer.» Si l'on écoute ce que la Maison-Blanche raconte en l'espèce, l'Iran devrait même servir de modèle pour les Arabes du Golfe.
Derrière de telles déclarations il y a une nouvelle vision du rôle de l'Amérique au Moyen-Orient. Aux yeux d'Obama, les États-Unis n'ont pas vocation à conduite longtemps une coalition visant à imposer l'ordre dans la région. Il préfère être le médiateur d'une grande négociation entre l'Iran chiite et les pouvoirs sunnites. Depuis plus d'un an à présent, quand il explique le but de sa diplomatie, le Président revient systématiquement sur le même terme : «l'équilibre.» Si les États-Unis font leur travail correctement disait-il à Friedman, «il est possible que nous commencions à voir naître un équilibre dans la région, et que Sunnites et Chiites, Saoudiens et Iraniens commencent à dire: "Peut-être devrions-nous réduire les tensions entre nous et focaliser notre attention sur les extrémistes comme l'État islamique qui mettraient le feu à toute la région s'ils en avaient le pouvoir".»
Le Président croit que sa politique de détente, essentiellement son désir d'un compromis sur le programme nucléaire iranien, convaincra les dirigeants de Téhéran que les États-Unis ne considèrent plus leur régime comme hostile. Ils travailleraient donc sur un mode plus coopératif avec Washington, surtout dans des endroits comme l'Irak et la Syrie où nous partageons un intérêt commun supposé pour la stabilité et la défaite de l'État islamique. Dans un premier temps ce changement pourra inquiéter les alliés traditionnels de l'Amérique. Mais grâce à sa médiation, leur peur paranoïaque de l'Iran diminuera un jour. On connaitre alors une situation d'équilibre.
La réponse des Saoudiens à la religion de l'équilibre d'Obama a été apportée récemment. Riyad a organisé une coalition sunnite qui est intervenue au Yémen. Cette intervention correspondait certainement, comme on l'a dit, à la volonté de bloquer l'avancée des rebelles Houthis soutenus par l'Iran au Yémen. Mais c'était aussi l'occasion d'envoyer un message à Obama : "si vous ne voulez pas organiser la région pour contenir l'Iran, nous nous en occuperons." Pour bien se faire comprendre, les Saoudiens ont informé Washington de leur décision une heure seulement avant le début de l'opération.
Cependant, le projet de Riyad d'organiser les Sunnites est hérissé de difficultés. Les trois puissances les plus influentes, l'Arabie Saoudite, l'Égypte, et la Turquie, sont d'accord, quand il s'agit de déclarations générales, comme se dire défavorables à un Moyen-Orient dominé par l'Iran. Mais au-delà, ils n'ont pas une vision unifiée. Les trois pays ne peuvent pas se mettre d'accord sur une politique commune en Syrie, sans parler d'une stratégie commune pour la région tout entière. C'est un fait regrettable, mais il n'y a rien qui ressemble ici à un bloc sunnite.
Tandis qu'il existe un bloc iranien : «l'Alliance des résistances» comme elle se nomme elle-même, comprend la Syrie, le Hezbollah et tout un réseau de milices chiites qui opèrent désormais en Irak, en Syrie et de plus en plus au Yémen. Ce qui garantit la cohésion de ce système est la Force al-Qods des Gardes de la Révolution. Par la subversion et l'extorsion, en jouant sur les divisions ethniques, la Force al-Qods assure l'extension de l'influence de l'Iran sur la région. Aucun État sunnite ne dispose d'une branche militaire analogue à la Force al-Qods.
En bref, la recherche de l'équilibre selon Obama consiste à renforcer l'un des acteurs, l'Iran, qui dispose des moyens les plus importants pour projeter son pouvoir et son influence à l'extérieur sans la moindre considération pour la souveraineté de ses voisins.
À part l'Iran, la seule puissance de la région véritablement capable de projeter un pouvoir militaire effectif à l'extérieur est Israël. Mais sa petite taille limite sa capacité de conduire une stratégie régionale d'envergure. De plus, les réalités du conflit israélo-arabe font obstacle à la coopération avec les pouvoirs sunnites. Alors que les intérêts de l'Arabie Saoudite et d'Israël convergent aujourd'hui à un degré remarquable, un gouffre historique continue de séparer Riyad et Jérusalem. Ils peuvent se coordonner discrètement, mais les obstacles à une coopération ouverte s'avéreraient probablement insurmontables.
Le désordre et l'atomisation qui règnent entre les États anti-iraniens du Moyen-Orient entraîne qu'à l'image du Congrès américain, ils seront vraisemblablement incapables de bâtir une opposition décisive à la politique de détente avec l'Iran d'Obama. Mais leur incapacité à la mettre en échec ne signifie pas qu'ils l'accepteront un jour. Ils seront toujours impliqués dans la contestation de cette politique, et ils continuerons de lutter contre l'Iran et ses créatures au Yémen, en Syrie, et en Irak, sans compter les nouveaux champs de bataille qui apparaîtront avec le temps.
La détente, aboutira donc à un déséquilibre, l'opposé exact de l'effet attendu. En négociant un accord de contrôle des armements, le Président est en train de modifier l'ordre des plaques tectoniques du Moyen-Orient. Et pour une plaque tectonique, il suffit d'un déplacement de quelques centimètres pour anéantir des cités entières.
Note
1 - C'est ainsi que la loi Corker Menendez a été définitivement adoptée par les deux chambres du Congrès à une très forte majorité le 14 mai 2015.
Note
1 - C'est ainsi que la loi Corker Menendez a été définitivement adoptée par les deux chambres du Congrès à une très forte majorité le 14 mai 2015.
Titre original : TheTectonic Shift in Obama's Iran Policy
Date de première publication: le 22 avril 2015, Hudson Institute
Traduction : Jean-Pierre Bensimon
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire