A la différence de certains Européens, les Israéliens semblent jouir d’une très bonne santé mentale
Un article de Haaretz d’avril dernier a suscité de nombreuses réflexions sur l’étrange bonheur collectif des Israéliens tel qu’il apparait dans une étude datant l’année précédente publiée par la très sérieuse OCDE . « L’indice de bien-être subjectif » place les Israéliens, aux premiers rangs du groupe des 34 pays membres de l’OCDE (plus le Brésil et la Russie), où figurent les pays occidentaux les plus prospères de la planète. Israël se trouve à la 6ème place ex-æquo avec la Finlande, l’Australie et le Canada avec un indice de 7,4 sur 10 au maximum.
Ce résultat est d’autant plus paradoxal que d’autres indices de la même étude sont beaucoup moins favorables à Israël, parfois même préoccupants, comme le très modeste score des étudiants. Avec son réalisme noir coutumier, Haaretz se demande d’ailleurs si les Israéliens n’ont pas indiqué aux enquêteurs le contraire des sentiments qu’ils ressentaient, alors que les techniques des sondages corrigent ce genre de biais. D’autres Israéliens ont fait preuve de bien plus d’humour en détaillant les misères qui guettent le citoyen de l’État juif dès son lever au petit matin : la chaleur estivale accablante, la chasse aux appartements à louer, la crainte de prendre du poids, les horaires de travail démesurés, le déclenchement d’une Intifada, l’arrivée de missiles iraniens, etc. Et malgré tout…
A « l’indice de bonheur » de l’OCDE on peut d’ailleurs ajouter d’autres performances intrigantes. La capacité de récupération des troubles post-traumatiques par exemple. Tiffanie Wen (1) rapporte que les Israéliens confrontés à la seconde Intifada récupéraient nettement plus vite que les New-yorkais après le 11 septembre. Il semble que le niveau d’anxiété ressenti par les Israéliens soit nettement plus élevé que celui des autres Occidentaux (ce qui se comprend bien quand on connait leur voisinage). Mais le nombre de personnes justifiant un traitement médical de cette affection est sensiblement inférieur, même dans les périodes de grande violence. Cette capacité mentale à surmonter l’adversité peut s’expliquer par la vie dans une zone de guerre ininterrompue qui aiguise la résistance au stress et incite à profiter sans barguigner des moments agréables.
Mais le bien-être israélien s’exprime sans doute avec plus de signification, à travers d’autres paramètres : la santé (l’espérance de vie y est au 6ème rang dans le monde), mais aussi le progrès de la fécondité et la faible proportion de suicides. Ces deux derniers indices, déterminants, sont plutôt orientés en sens contraire chez les principaux concurrents à la médaille occidentale du bien-être. Grâce à eux, les Israéliens pourraient manifester une insolente satisfaction, qui serait peut-être justement le stade suprême du bonheur.
C’est l’exemple que donne avec justesse l’Américain David P.Goldman (2 ) dans « Avis à ceux qui haïssent les Juifs : vous êtes en train de mourir ». Goldman observe la résurgence contemporaine de courants antisémites brutaux dans trois pays européens. Celui de l’Alliance des Cinq étoiles de Beppe Grillo en Italie : « Hitler était peut-être un malade, mais s’il voulait éliminer les Juifs, c’était pour éliminer la dictature de la finance » Celui du parti Jobbik en Hongrie dont un candidat aux élections européennes écrivait « Non seulement l’antisémitisme est notre droit, mais il est du devoir de tout Hongrois qui aime sa patrie de se préparer à des combats armés contre les Juifs. » Dans la même veine, les parlementaires grecs de l’Aube dorée lisent publiquement des extraits des Protocoles de Sages de Sion.
Or ces trois pays ne sont pas des foudres d’optimisme (au 26ème rang sur 36 pour l’indice de bien-être subjectif, l’Italie ; au 32ème la Grèce et au 36ème la Hongrie). Chez eux aussi la fécondité s’effondre. Dans le cas de la Hongrie, elle s’accompagne d’une forte propension au suicide. Les décennies à venir s’annoncent terribles; ces pays vont connaître simultanément un progrès vertigineux de la part vieillissante de leur population et un affaissement non moins spectaculaire du groupe des 15-25 ans. Une catastrophe démographique aux conséquences incalculables pour le moral, l’existence et l’identité nationale de chacun d’entre eux.
L’Israélien pourrait bien rire des sombres lendemains des obsessionnels de la haine antisémite car c’est tout le contraire qui se dessine pour son pays :
Dans ce graphique, la droite montre que la tendance au suicide, donc au pessimisme collectif, est d’autant plus forte que la fécondité est basse. Israël occupe une place unique aussi bien pour la fécondité (élevée) que la suicidité (faible) ce qui en dit long sur les ressorts mentaux de son peuple. A l’inverse, la Hongrie connait l’un des pires scénarios, ce qui aura un retentissement sur le devenir problématique de sa population et de ses antisémites, tout comme sur leur humeur.
1 - Why are Israelis so Damn Happy?, The Daily Beast, 14 Avril 2013
2 - Memo to Jew-Haters on Yom HaSoah : You are dying Pjmedia, 8 avril 2013
Un article de Haaretz d’avril dernier a suscité de nombreuses réflexions sur l’étrange bonheur collectif des Israéliens tel qu’il apparait dans une étude datant l’année précédente publiée par la très sérieuse OCDE . « L’indice de bien-être subjectif » place les Israéliens, aux premiers rangs du groupe des 34 pays membres de l’OCDE (plus le Brésil et la Russie), où figurent les pays occidentaux les plus prospères de la planète. Israël se trouve à la 6ème place ex-æquo avec la Finlande, l’Australie et le Canada avec un indice de 7,4 sur 10 au maximum.
Ce résultat est d’autant plus paradoxal que d’autres indices de la même étude sont beaucoup moins favorables à Israël, parfois même préoccupants, comme le très modeste score des étudiants. Avec son réalisme noir coutumier, Haaretz se demande d’ailleurs si les Israéliens n’ont pas indiqué aux enquêteurs le contraire des sentiments qu’ils ressentaient, alors que les techniques des sondages corrigent ce genre de biais. D’autres Israéliens ont fait preuve de bien plus d’humour en détaillant les misères qui guettent le citoyen de l’État juif dès son lever au petit matin : la chaleur estivale accablante, la chasse aux appartements à louer, la crainte de prendre du poids, les horaires de travail démesurés, le déclenchement d’une Intifada, l’arrivée de missiles iraniens, etc. Et malgré tout…
A « l’indice de bonheur » de l’OCDE on peut d’ailleurs ajouter d’autres performances intrigantes. La capacité de récupération des troubles post-traumatiques par exemple. Tiffanie Wen (1) rapporte que les Israéliens confrontés à la seconde Intifada récupéraient nettement plus vite que les New-yorkais après le 11 septembre. Il semble que le niveau d’anxiété ressenti par les Israéliens soit nettement plus élevé que celui des autres Occidentaux (ce qui se comprend bien quand on connait leur voisinage). Mais le nombre de personnes justifiant un traitement médical de cette affection est sensiblement inférieur, même dans les périodes de grande violence. Cette capacité mentale à surmonter l’adversité peut s’expliquer par la vie dans une zone de guerre ininterrompue qui aiguise la résistance au stress et incite à profiter sans barguigner des moments agréables.
Mais le bien-être israélien s’exprime sans doute avec plus de signification, à travers d’autres paramètres : la santé (l’espérance de vie y est au 6ème rang dans le monde), mais aussi le progrès de la fécondité et la faible proportion de suicides. Ces deux derniers indices, déterminants, sont plutôt orientés en sens contraire chez les principaux concurrents à la médaille occidentale du bien-être. Grâce à eux, les Israéliens pourraient manifester une insolente satisfaction, qui serait peut-être justement le stade suprême du bonheur.
C’est l’exemple que donne avec justesse l’Américain David P.Goldman (2 ) dans « Avis à ceux qui haïssent les Juifs : vous êtes en train de mourir ». Goldman observe la résurgence contemporaine de courants antisémites brutaux dans trois pays européens. Celui de l’Alliance des Cinq étoiles de Beppe Grillo en Italie : « Hitler était peut-être un malade, mais s’il voulait éliminer les Juifs, c’était pour éliminer la dictature de la finance » Celui du parti Jobbik en Hongrie dont un candidat aux élections européennes écrivait « Non seulement l’antisémitisme est notre droit, mais il est du devoir de tout Hongrois qui aime sa patrie de se préparer à des combats armés contre les Juifs. » Dans la même veine, les parlementaires grecs de l’Aube dorée lisent publiquement des extraits des Protocoles de Sages de Sion.
Or ces trois pays ne sont pas des foudres d’optimisme (au 26ème rang sur 36 pour l’indice de bien-être subjectif, l’Italie ; au 32ème la Grèce et au 36ème la Hongrie). Chez eux aussi la fécondité s’effondre. Dans le cas de la Hongrie, elle s’accompagne d’une forte propension au suicide. Les décennies à venir s’annoncent terribles; ces pays vont connaître simultanément un progrès vertigineux de la part vieillissante de leur population et un affaissement non moins spectaculaire du groupe des 15-25 ans. Une catastrophe démographique aux conséquences incalculables pour le moral, l’existence et l’identité nationale de chacun d’entre eux.
L’Israélien pourrait bien rire des sombres lendemains des obsessionnels de la haine antisémite car c’est tout le contraire qui se dessine pour son pays :
Dans ce graphique, la droite montre que la tendance au suicide, donc au pessimisme collectif, est d’autant plus forte que la fécondité est basse. Israël occupe une place unique aussi bien pour la fécondité (élevée) que la suicidité (faible) ce qui en dit long sur les ressorts mentaux de son peuple. A l’inverse, la Hongrie connait l’un des pires scénarios, ce qui aura un retentissement sur le devenir problématique de sa population et de ses antisémites, tout comme sur leur humeur.
1 - Why are Israelis so Damn Happy?, The Daily Beast, 14 Avril 2013
2 - Memo to Jew-Haters on Yom HaSoah : You are dying Pjmedia, 8 avril 2013
Pour un autre regard sur le Proche-Orient n° 10 Avril/Mai 2013
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