Le
gouvernement israélien va devoir prendre une décision délicate dans les jours à
venir. Israël doit-il se joindre au programme européen «Horizon 2020 » et accepter
ainsi publiquement la décision de l'Union européenne considérant
la présence israélienne au-delà des lignes d'armistice de
1949 comme illégale ? Ou alors le gouvernement doit-il refuser les exigences européennes
et renoncer aux bénéfices financiers et scientifiques de «Horizon 2020 » ?
La plupart
des chercheurs et universitaires israéliens implorent le gouvernement pour
qu'il participe à «Horizon 2020 » en dépit des exigences européennes (ou
peut-être du fait même de ces exigences). Pourtant la renonciation à ce
programme apparaît beaucoup moins catastrophique que certains voudraient nous
le faire croire.
« Horizon
2020 » et le huitième « Programme cadre » de l'Union européenne. Les programmes
cadre sont des fonds européens consacrés à la recherche et au développement, qui
fonctionnent à la façon des fonds d'investissement : les états membres apportent une
contribution calculée en fonction du Produit intérieur brut, et le retour sur
investissement (ROI), dépend du nombre d'entreprises et d'instituts de recherche
qui utilisent avec succès les subventions du programme cadre.
Israël a été
le premier et le seul pays non-européen admis comme participant de plein
exercice au cinquième programme cadre (1998-2002). Par la suite, il a pris part
au sixième programme cadre (2002-2006), ainsi qu'au septième (2007-2013). Israël
a pu participer à ces programmes du fait de son excellence scientifique qui
bénéficie aux activités de recherche-développement européennes. De plus, la
participation israélienne s'est avérée parfaitement pertinente, et avisée du
point de vue financier. Israel a investi 152,1 millions d'€ dans le cinquième
programme cadre qui lui a rapporté en retour 166,8 millions d'€. Pour le
septième programme cadre, Israel a investi 535 millions d'€ et a reçu en retour
698 millions d'€. Pour Israël l'enjeu se situe au-delà des chiffres, fussent-ils
impressionnants. Sa participation renforce une coopération scientifique de
valeur entre les universités, les entreprises et les instituts de recherche
israéliens et européens.
Cependant, tous
ces faits ne sont pas rapportés avec fidélité par les principaux médias
israéliens. Yediot Aharonot, par
exemple, a publié un article qui prétend qu'Israël reçoit 1,5 euros pour chaque
euro investi dans le programme cadre. En fait, Israel a reçu 1,09 euro pour un
euro investi dans le cinquième programme cadre, et 1,3 euros pour un euro
investi dans le septième programme cadre. Yediot Aharonot, induit aussi en
erreur ses lecteurs en affirmant que le rapport erroné de 1,5 euros reçus pour
un euro dépensé serait garanti pour le programme « Horizon 2020 ». Il n'y a
aucune garantie de ce genre. Il est tout à fait justifié de supposer que la
participation d'Israël serait encore une fois fructueuse. Cependant prétendre
comme l'a fait Yediot Aharonot, qu'Israël investirait 600 millions d'euros et
recevrait 900 millions en retour, est tout simplement faux. Israël ne perdrait
pas 300 millions d'€ en s'abstenant de participer à «Horizon 2020 ». Il
perdrait des partenariats scientifiques de valeur, et une occasion
d'investissement probablement profitable. Cependant ces 600 millions d'€
peuvent être directement investis dans la recherche-développement israélienne.
Dans son blog
de The Times
Of Israel, Naomi Chazan prétend même qu'en ne se joignant pas à «Horizon
2020 », Israel «verrait se disloquer la clé de voute qui a fait d'Israël une
nation start-up». C'est absurde. Israël ne doit pas son statut de « nation
start-up » à l'Union européenne. La perte possible de quelque 200 millions
d'euros sur six ans ne conduirait pas à « l'effondrement » de la
recherche-développement d'Israël.
La véritable
question est de savoir si les bénéfices indiscutables de la participation à «Horizon
2020 » justifient l'acceptation par Israël des nouvelles conditions posées par
l'Union européenne.
Le 19 juillet
2013, la Commission européenne a publié une Directive interdisant tout
financement et toute coopération de l'Europe avec les entités israéliennes
situées au-delà de la ligne d'armistice de 1949. Elle exige donc que tout
accord signé entre un État membre de l'Union européenne et Israël inclue une
clause stipulant que les territoires situés au-delà des lignes d'armistice de
1949 ne font pas partie de l'État d'Israël. À présent par exemple, le Mur
occidental et le Mont Sion, se trouvent au-delà des lignes d'armistice de 1949.
Israël devrait reconnaitre publiquement « l'illégalité » de son contrôle sur ces
deux sites historiques juifs pour pouvoir recevoir des subventions européennes.
L'exigence européenne n'est pas seulement dénuée de tout fondement en droit
international. Elle est aussi profondément humiliante.
Naturellement,
l'Union européenne applique à Israël un système de deux poids deux mesures quand
on le compare à celui d'autres pays qui ont aussi passé des accords avec l'Union
européenne. Par exemple, celle-ci a signé avec la Turquie en 1995 un accord
d'association spécifique. Elle n'a cependant jamais annoncé que les productions
turques, réalisés ou assemblées dans le nord de Chypre occupé seraient exclues
de cet accord. En 2005, l'Union européenne a aussi signé avec le Maroc un
accord portant sur les activités de pêche. Cet accord s'applique au Sahara
occidental même si l'Union européenne ne reconnaît pas la souveraineté du Maroc
sur cette région. L'Union européenne est en train de négocier un traité de
libre-échange avec l'Inde. Encore une fois, l'application de cet accord dans le
territoire disputé du Cachemire n'est pas en discussion.
Si l'Union
européenne refuse de revenir sur ces nouvelles exigences, Israël se trouvera sans
nul doute face à un dilemme cornélien. Ceux qui plaident pour la participation
à «Horizon 2020 » en dépit des nouvelles clauses européennes peuvent le faire
en toute légitimité. Cependant, ils doivent cesser d'induire le public en
erreur en dramatisant les enjeux, chiffres erronés à l'appui. Le refus du
système de deux poids deux mesures sans base légale de l'Union européenne doit
être sérieusement envisagé. Si on faisait ce choix, les conséquences en seraient
tout à fait supportables.
par Emmanuel Navon, publié le 12 août 2013
Titre original : IsraelDoes Not Owe Its Start-Up Nation Status to the European Union
Traduction : Jean-Pierre Bensimon
Il serait temps qu'Israël refusât de se laisser intimider ou dicter sa conduite. Quel état-nation souverain se voit-il humilié de la sorte ? L'arrogance de l'UE doit être méprisée en retour.
RépondreSupprimerISrael doit affirmer son independance économique, politique, financière, militaire, culturelle et académique
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