Différentes théories s'affrontent pour tenter d'élucider les motifs de l'accord passé avec l'Iran sous l'égide d'Obama, dont l'effet transparent est de renforcer militairement et financièrement le régime le plus belliciste et anti-occidental de la planète, et de répandre la guerre dont les braises brûlent le Moyen-Orient, au détriment des intérêts vitaux de l'Amérique et de ses alliés. L'article ci-dessous est une réfutation de la stratégie de l'équilibre d'Obama.
Introduction
Titre original : Obama's Strategy Of Equilibrium
Première publication : 5 août 2015 The Middle East Media Research Institute
Auteurs : Ygal Carmon président fondateur de Memri; et Alberto M. Fernandez Vice President de Memri
Traduction : Jean-Pierre Bensimon
Introduction
Lors d'une interview à Thomas Friedman du New York Times, ("Obama plaide pour l'accord nucléaire iranien", 14 juillet 2015) le président Obama a demandé que l'accord nucléaire avec l'Iran ne soit jugé qu'en fonction de sa capacité à empêcher l'Iran de se doter d'une arme nucléaire, et non sur des questions comme "est-il en mesure de transformer le régime intérieur de l'Iran?" ou "[avec cet accord] sommes-nous en train de résoudre tous les problèmes à propos de l'Iran?" Cependant dans de nombreuses interviews données ces dernières années, il exposait une stratégie et un plan allant bien au-delà de l'accord iranien : une stratégie visant à créer un équilibre entre les Sunnites et les Chiites dans le monde musulman.
Le président Obama croit qu'un tel équilibre permettrait d'aboutir à un Moyen-Orient plus pacifique, où les tensions entre les pouvoirs régionaux seraient ramenées à de simples différends. Comme il l'a dit à David Remnick dans une interview à The New Yorker, "… si nous sommes capables d'amener l'Iran à agir de façon responsable… vous pourrez observer l'établissement d'un équilibre entre les Sunnites, où la majorité Sunnite, les états du golfe et l'Iran, où il y aurait de la compétition peut-être des soupçons, mais pas de guerre directe ou par procuration" ("Aller jusqu'au bout", 27 janvier 2014).
Quand il débat de l'accord iranien, le Président rappelle les négociations des présidents Nixon avec la Chine et Reagan avec l'Union soviétique pour illustrer sa stratégie au Moyen-Orient et dans le monde musulman. A l'image des présidents Reagan et Nixon avec la Chine et l'Union soviétique, le président Obama cherche à transformer la Région dans son ensemble. L'accord avec l'Iran, même s'il est de grande importance, n'est que l'un des véhicules susceptibles de l'aider à atteindre ses objectifs.
Cet article analysera la stratégie consistant à créer un équilibre entre les Sunnites et les Chiites comme moyen de promouvoir la paix au Moyen-Orient. Il analysera la signification de cette stratégie en termes politiques, son degré de réalisme, et ses implications pour l'avenir de la Région et pour les États-Unis.
La signification de la stratégie d'équilibre en termes politiques
Pour analyser la stratégie de l'équilibre, il faut réunir un certain nombre d'informations de base. Dans la masse des 1,6 milliards de fidèles au sein de l'islam, la majorité absolue -environ 90 %- est sunnite tandis que les Chiites ne représentent que 10 %. Même au Moyen-Orient, les Sunnites constituent une large majorité.
Qu'est-ce que le mot "équilibre" signifie en termes politiques ? En fonction des données exposées plus haut, le mot "équilibre", en termes politiques concrets, signifie renforcer la minorité, et donc affaiblir la majorité pour progresser en direction de l'objectif. Cependant l'écart écrasant entre les uns et les autres rend impossible l'atteinte d'un équilibre entre les deux camps. Il n'est donc pas réaliste de croire que la majorité acceptera une politique qui renforce ses adversaires et affaiblit son propre statut historiquement supérieur.
Implications pour la région
À partir des remarques ci-dessus, l'application d'une stratégie d'équilibre dans la Région ne serait pas le facteur de consolidation de la paix qui entre dans les intentions du Président ; elle aboutirait plutôt à intensifier là-bas les conflits et la violence. La minorité renforcée serait persuadée de pouvoir multiplier ses activités expansionnistes, comme on peut déjà l'observer : l'Iran a étendu son influence du Liban jusqu'au Yémen. Un expert iranien, Mohammad Sadeq al-Hosseini, déclarait le 24 septembre 2014, lors d'une interview, "nous, l'axe de la résistance, nous sommes les nouveaux sultans de la Méditerranée et du Golfe. Nous, à Téhéran, à Damas, dans la banlieue sud de Beyrouth [Hezbollah], à Bagdad, et à Sanaa, nous reconfigurons la carte de la Région. Nous sommes aussi les nouveaux sultans de la Mer Rouge" (MEMRITV Clip n° 4530). De même, dans une déclaration sur les liens historiquement indivisibles entre l'Irak et l'Iran, Ali Younesi, un conseiller du président Rouhani soulignait que, "depuis sa création, l'Iran a [toujours] eu une [dimension] mondiale ; il est venu au monde d'emblée en tant qu'empire" (MEMRI Report n° 5991).
En fonction de cette réalité et contrairement aux suppositions du Président, cette stratégie pourrait aboutir à accroître l'amertume et la volonté de combattre de la majorité pour la préservation de son statut. C'est ce qui se passe déjà: par exemple, face à la révolution Houthi/chiite qu'elle considère comme un grave danger pour sa survie, l'Arabie Saoudite est intervenue au Yémen et a bâti une coalition combattante en un mois pour s'y opposer.
Pareillement, l'Arabie Saoudite a montré dans le passé qu'elle considérait Bahreïn comme un endroit où chaque tentative iranienne visant à provoquer des soulèvements doit recevoir une réponse militaire de sa part. Selon différents rapports, l'Arabie Saoudite a soutenu les populations sunnites en Irak, et au Liban. Le statu quo s'est installé parce que l'Arabie saoudite a montré qu'elle n'abandonnerait pas, même dans des endroits où le Hezbollah, la marionnette de l'Iran, est la force principale. De ce fait, la stratégie d'équilibre a davantage de chances d'aboutir à l'éruption d'une guerre régionale qu'à l'établissement d'une paix générale.
Les conséquences pour les États-Unis
De plus, la stratégie d'équilibre pourrait avoir des implications négatives pour les États-Unis et leurs intérêts. Dans le monde musulman sunnite où les pays se sentent désormais trahis, on observe des prises de position hostiles à Washington -heureusement limitées au plan politique (des changements d'alliances internationales par exemple) ou au plan économique. Ces pays peuvent être prudents dans leurs déclarations publiques, et ils font même entendre un soutien rhétorique à la politique américaine, comme le Conseil Général du Golfe le 3 août, mais le ressentiment est là.
Realpolitik contre considérations morales
Les analyses présentées ici sont fondées sur les principes de la realpolitik : en politique, on ne doit pas s'aligner sur la minorité contre la majorité. Cependant, quelquefois, d'autres considérations prennent le dessus. La moralité en est une par exemple : les alliés ne pouvaient pas s'abstenir de combattre l'Allemagne nazie parce que c'était la puissance majeure -au bout du compte, ils reconnurent avoir l'obligation morale de combattre le troisième Reich. Cependant, en ce qui concerne le Moyen-Orient, les deux adversaires sont de même importance : la République islamique d'Iran n'est pas différente du royaume wahhabite d'Arabie Saoudite. Le président Obama et le secrétaire Kerry auraient tort de penser que Mohammad Javad Zarif, le convive raffiné de New York City, représente l'Iran réel. Zarif, son équipe des négociateurs, et le président Rouhani lui-même, existent dans l'ombre du Guide Suprême, des ayatollahs, et des Gardiens de la révolution, et ils sont à leur merci.
"Il est bon de noter que le premier État islamique créé au Moyen-Orient dans les 50 dernières années n'est pas celui qui est issu du monde sunnite en 2014 et qui est dirigé par Abou Bakr al-Baghdadi." Il s'agit plutôt de la République islamique d'Iran créée en 1979 par l'ayatollah Ruhollah Khomeiny, et actuellement dirigée par son successeur, le Guide Suprême Ali Khamenei qui répète inlassablement -même après l'accord nucléaire- le slogan "Mort à l'Amérique," qui continue de financer le terrorisme dans le monde entier, et qui s'adonne à d'horribles violations des droits de l'homme.
Première publication : 5 août 2015 The Middle East Media Research Institute
Auteurs : Ygal Carmon président fondateur de Memri; et Alberto M. Fernandez Vice President de Memri
Traduction : Jean-Pierre Bensimon
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