L'accord nucléaire avec le régime fanatiquement antijuif d'Iran va alimenter le racisme sur toute la planète.
Pour beaucoup d'Américains, l'élection de Barack Obama à la Présidence était l'annonce de la victoire définitive du pays sur le racisme. En effaçant l'héritage de l'esclavage et de la discrimination institutionnalisée, sa victoire était célébrée comme un moment de rédemption pour l'Amérique, et potentiellement pour toute l'humanité. Comme il est grotesque de voir à présent le Président éteindre cet espoir et alimenter le racisme à l'échelle de la planète.
Le régime iranien est actuellement la figure de proue du racisme antijuif mondial. On est amené à faire des comparaisons avec l'Allemagne nazie faute de mieux, car il nous est difficile de sonder les racines du mal que les nazis ont perpétré bien que nous en ayons toutes les preuves sous les yeux. Pourtant les ambitions génocidaires affichées de l'Iran sont sans commune mesure avec celles de ses prédécesseurs. Alors que Adolphe Hitler et Reinhart Heydrich élaboraient la « solution finale » en secret, en utilisant des euphémismes pour faire connaître leur intention d'anéantir les Juifs d'Europe, le Guide suprême de l'Iran, l'ayatollah Ali Khamenei, tweete à propos d'Israël « il n'y a pas d'autres remèdes que l'annihilation. » Les dirigeants de l'Iran, se délectant de la si petite taille de ce pays, le qualifient «d'État d'une seule bombe,» et en attendant le moment de lancer cette bombe, ils financent le terrorisme anti israélien à travers le Hamas, le Djihad islamique, et autres milices.
Le président Obama prend au sérieux certaines formes de racisme. Sans attendre que le verdict ne soit rendu, il s'était rué à la défense de mon collègue de Harvard, Henri Louis "Skip" Gates Jr., qui était impliqué en 2009 dans un conflit avec la police de Cambridge qui enquêtait sur une effraction dans sa maison. En 2012, lors du tir controversé sur Trayvon Martin à Sanford, Floride, le président s'était identifié à la victime d'un acte supposé de racisme au point de dire que le jeune de 17 ans «aurait pu être mon fils.»
Or quand il est question du racisme le plus répandu au monde et le plus enraciné dans une idéologie, le président Obama semble rencontrer un point aveugle. Il a pris l'initiative d'un accord nucléaire avec le régime fanatiquement antijuif de Téhéran, sans tenir compte de ce qu'il qualifie lui-même de « mauvais comportement » de l'Iran. Cette fois-ci, c'est lui qui emploie un euphémisme, pas les auteurs du projet criminel, et cet euphémisme camoufle leurs intentions, alors que ces derniers ne veulent rien cacher.
Peut-être que M. Obama n'a-t-il pas conscience de ce que l'universitaire Robert Wistrich (qui est décédé en mai) appelait « la haine la plus longue » parce qu'elle était si présente dans le monde où il grandissait. L'hostilité envers les Juifs de l'Indonésie musulmane où il vécut entre six et 10 ans, n'était pas plus virulente qu'au Pakistan et en Iran. L'animosité à l'encontre des Juifs et d'Israël était la marque de l'Église du révérend Jeremia Wright à Chicago, que M. Obama fréquenta pendant deux décennies. Et avant d'entamer son mandat, M. Obama incarnait les standards de la gauche internationale qui avait inventé le slogan infame : sionisme = impérialisme. Quand il fut candidat à la Présidence, M. Obama se sentit obligé de rompre avec son pasteur (célèbre pour avoir maudit l'Amérique en chaire), et de modifier ses références d'extrême gauche. M. Obama fut élu à son poste par un électorat amoureux de l'idée qu'il s'opposerait à toutes les formes de racisme. Il n'a pas répondu à cet espoir.
Certains critiques juifs de M. Obama peuvent être tentés de mettre ces changements sur le compte d'une tradition commune aux Présidents, mais il y une différence. On peut ainsi soutenir que le président Roosevelt aurait dû bombarder les voies d'accès à Auschwitz, ou permettre aux réfugiés juifs à bord du Saint-Louis de jeter l'ancre aux États-Unis lors de la seconde guerre mondiale, mais il n'y avait là au pire que péché par omission. Tout au contraire, l'accord nucléaire du président Obama avec l'Iran est un acte intentionnel. C'est la première fois que les États-Unis vont passer délibérément un pacte avec un pays décidé à annihiler un autre peuple - un pacte où il n'est même pas exigé de ce pays qu'il répudie formellement ses objectifs génocidaires.
En tant que Juive, je sais que faire appel à l'histoire est à peu près aussi efficace que les menaces d'un enfant contre une force dont il ne peut pas venir à bout. Néanmoins, les Juifs « écrivent » l'histoire, du fait des forces maléfiques rassemblées contre eux. Parce que les régimes les plus agressifs et les plus répressifs planifient en permanence des entreprises hostiles aux Juifs, le peuple juif est devenu la « véritable boussole » de la tolérance et des inquiétudes sur le sujet des droits de l'homme. Ceux qui défendent les Juifs sont nécessairement du côté de la paix et de la fraternité, ceux qui les attaquent sont invariablement du côté du mal. En fonction de l'issue de l'accord iranien, ce rapprochement avec un régime antijuif pourrait un jour se trouver sur le même plan que la souillure de l'esclavage dans l'héritage de l'Amérique. Israël s'efforcera de protéger ses citoyens, mais M. Obama a augmenté les risques qui pèsent sur eux.
Qu'en est-il des Juifs américains dans tout cela ? On imagine parfois à tort que ceux qui soutiennent passionnément Israël sont moins bien ardents à l'égard de l'Amérique. C'est juste le contraire : l'agression antijuive est toujours motivée par le mode de vie indépendant que les Juifs représentent. « Mort aux juifs ! » est un appel aux armes contre les démocraties libérales occidentales ; c'est pourquoi en Iran ce cri est souvent accompagné de « Mort à l'Amérique ! »
Les Américains qui tentent de stopper l'Iran ne sont pas hostiles au Président. Ils sont sensibles à l'espérance de la fin du racisme qu'il a incarnée il fut un temps. Ils désirent un traitement également respectueux pour les Noirs et pour les Juifs. Ils croient que l'Amérique représente la meilleure part de la nature humaine.
Titre original : Obama’s Racial Blind Spot
Auteur : Ruth R. Wisse, professeur de littérature comparée à Harvard
Première publication: Wall Street Journal, le 30 juillet 2015
Traduction : Jean-Pierre Bensimon
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